Sadek x Fifou – Johnny de Janeiro


Le rappeur, on le sait, est largement coutumier de la mise en scène de sa propre personne à travers ses artworks. Parfois politique (To Pimp a Butterfly de Kendrick Lamar), souvent narcissique (Booba et son Trône), et parfois loufoque et humoristique, aussi. C’est notamment le parti du rappeur Sadek qui, avec la pochette de son album VVRDL (pour « Vulgaire, Violent et Ravi D’être Là ») avait emmené, déjà, l’imagerie du rap game sur le terrain, non pas de l’egotrip thug ou du coup de poing politique, mais vers celui, plus léger, d’une partie de Scrabble endiablée, avec thé, macaron, et bifton (quand même !) Un parti pris burlesque et absurde qui avait déjà attiré notre attention l’an dernier au moment de sa sortie, et derrière lequel on avait retrouvé, sans trop de surprise, le photographe chouchou du rap français : Fifou, responsable notamment du triptyque angélique et soigné lié au rappeur Youssoupha.

« Le kitsch, le grotesque et l’artisanal »

Aussi, c’est avec plaisir qu’on a découvert la dernière collaboration des deux compères pour le nouvel album de Sadek : Johnny de Janeiro. Fifou : « Après les retours positifs de la pochette de Violent, vulgaire et ravi d’être là, plein de choses se sont ‘’débloquées’’ dans notre esprit, on ne s’est plus mis de barrières. » Le résultat de cet « envol visuel sans limites », et une pochette encore plus fabuleusement kitch, mettant en scène le rappeur de Seine-Saint-Denis en « Julio Eglesias de cabaret » (une idée de Sadek), crinière au vent, boule de disco et perroquet ara dans les environs. Le tout forme un hommage, tendre et référencé, à un Brésil relu à la touche funky, un pays particulièrement cher au rappeur originaire de Neuilly-Plaisance. En piochant dans des inspirations aussi variées qu’ODB (« sa perruque sur la cover de Nigga Please, m’a profondément marqué » nous disait Fifou), Carlos (le mec de « Big Bisou », pas le parrain de la mafia…) et son stylisme fou et coloré, ou encore Rick James pour ses attitudes funky, Sadek, Fifou et Julien Leroux (le chef décorateur) semblent s’en être donnés à cœur joie ! Avec un objectif en tête : « le kitsch, le grotesque et l’artisanal. On voulait garder ce cote carte postale, ce cote un peu mal fait, et ce type de retouches très grossières, avec des phares de lumières à la Pen & Pixel, version 2018. » Pari gagné ?

On guettera donc la suite de cette collaboration fructueuse entre Sadek et Fifou, qui s’annonce une fois, encore mémorable. Fifou : « Pour le troisième volet, je veux partir dans une mise en scène digne de Pierre et Gilles. To be continued ! ». Stay tuned. 

Le son

Autotune lorsque les refrains l’obligent, flow posé, lyrics parfois gangsta, parfois burlesque, Sadek fait partie depuis 2012, et la sortie de son premier album La Légende de Johnny Niuuum, de ses rappeurs qui comptent et qui alignent les dizaines de milliers de vues sur les réseaux sociaux. Également vu au cinéma (il était cette année à l’affiche du film Tour De France de Rachid Djaïdani, dans lequel jouait aussi Gérard Depardieu), Sadek revient cette année avec Johnny de Janeiro, un disque dont on connaît, pour l’heure, le titre « Tentacíon ». Il se murmurerait que le rappeur Sofiane fera également partie, bientôt, de la nouvelle odyssée décalée de cet apôtre de l’absurde et des visuels kitschissimes.

Sadek (Site officiel / Facebook / Twitter / Instagram / Youtube)

Fifou (Site officiel / Facebook / Twitter)

Sadek, Johnny de Janeiro, 2018, Industreet / Warner Music France, artwork par Fifou