Booba – Trône


À contre-pied de tout ce qu’il avait pu proposer, visuellement parlant, depuis le début de sa carrière, où on le voyait, la plupart du temps, joint d’attributs virils et dominants (du gun de Ouest Side au torse dénudé et musclé de Panthéon, 0.9, et de Futur), Booba avait opté, afin d’illustrer son album Nero Nemesis (le huitième alors, de sa carrière) pour l’usage un artwork pourvu d’un blason figuratif, image d’un autre temps mettant alors en scène un lion pourvu d’ailes et la gueule ouverte, et coiffé par une couronne, là pour signifier au reste du monde sa toute-puissance absolue. Comme ce lion-là, et avec ce travail remarquable signé par le Discipline Studio et par Romain D’Abrigeon, Booba attestait de sa domination sur cette scène rap français qu’il domine, maintenant, depuis une bonne décennie.

Du Duc de Boulogne au Roi de France

Autoproclamé Duc de Boulogne depuis ses premières années dans le rap game, Booba affirmait, en positionnant cette couronne sur le lion de ce blason qui devait directement l’incarner, son statut, hautement plus prestigieux, de Roi de France et de Navarre. Et puisqu’il ne s’agit pas, avec la parution, deux ans après, d’un nouvel album (son neuvième), de baisser la garde et de laisser la place à un autre ambitieux prétendant, le MC en remet une couche avec le visuel de Trône, album au titre hautement régalien illustré, cette fois, via le portrait de Booba lui-même, directement représenté avec une large couronne sur la tête.

Rouge sang, rouge amour

Et si celle-ci pourrait paraître bien lourde, la tête de Booba la supporte, pourtant. Le visage calme, mais sévère, ce roi-là a la mesure de ses ambitions et, couvert par un manteau de fourrure qui pourrait rappeler celui de Jon Snow, membre de la Night Watch puis King of the North au sein la série Game of Thrones (le premier visuel dévoilé laissait d’ailleurs pensé que cet album serait illustré par un équivalent du Trône de Fer, également issu de la série Game of Thrones), semble ne pas devoir craindre qui que ce soit. Car Booba, et le reste de ce visuel une fois encore très réussi, est coloré par un rouge dur, celui du sang, de la passion, du triomphe, de la colère et du danger. Le rouge de l’amour, aussi, lui qui, au sein de cet album, ne se contente pas seulement de réaffirmer sa position toujours réelle de grand roi du rap français, mais déclame, à plusieurs reprises (notamment : le morceau « Petite Fille »), son amour et sa flamme à sa jeune fille, pas encore assez âgée pour se rendre compte à quel point son papa sera susceptible de la protéger, le cas échéant, si le danger vient à guetter…

#hiver2017 #muchofriomuchacho ⛄️

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Le son

L’une des grandes qualités d’un souverain, conscient de ce qu’implique sa position toute-puissante, est de savoir s’entourer, et de faire de ceux qui pourraient devenir ses dangereux ennemis de puissants alliés. Alors, sur Trône, le roi Booba invite les rappeurs Niska (son tube « Réseaux » est un succès délirant) et surtout Damso (featuring fulgurant sur « 113 »), auteur de l’un des albums (Ipséité) les plus remarqués de l’année, et en fait des vassaux parfaitement dignes de confiance. Niveaux prod, on retrouve Dany Synthé, DJ Easy, Heezy Lee, Twinsmatic, invités à habiller un album qui confirme l’attrait de Booba pour le trap-rap de plus en plus autotuné, tout en confirmant la dextérité de cette plume et de cette prose qui ne laissent pas de doutes quand à la destinée, immédiate, de ce royaume-là : Booba y demeurera, pour un moment encore sans doute, tout en haut.

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Booba, Trône, 2017, Tallac Records, 45 min.