Marika Hackman x Brian McHenry — Big Sigh
Un cadi abandonné en aval de la vallée. Et des montagnes enneigées qui se dessinent dans le fond. Un arbre ici, un autre là. Rien de plus, si ce n’est le froid qui paraît avoir tout imprégné. Le dessin au fusain de l’illustrateur irlandais Brian McHenry pour l’Anglaise Marika Hackman donne l’impression de l’instantanéité, du tout de suite maintenant, d’avoir été rapidement jeté par un dessinateur déjà pressé de passer à autre chose, de la même manière que ce produit typique de la société de consommation qui trône au milieu de l’image paraît avoir été trop vite glissé là, au milieu de nulle part, comme si le mouvement nécessitait, déjà, une intervention ailleurs.
Soupire
Les produits, dans les hypermarchés dans lesquels on conduit comme dans la ville en donnant la priorité à droite et en un jetant un œil au moment de manœuvrer, on les bazarde à la volée dans les cadis sans autre considération que la finalité à laquelle ils doivent aboutir : être jetés, de nouveau, mais dans une poubelle cette fois — recyclable, dans le meilleur des cas. Ce chariot, à son tour, a été posé là, le métal à l’air et légèrement éventré, comme si c’était un enfant, plutôt qu’un dessinateur aguerri, qui avait dû tracer ses traits.
Un objet phare du XXIe siècle qui rencontre un monument de ce que l’on juge généralement éternel : le cadi et la montagne se rencontrent et c’est un grand soupire — « a Big Sigh » — qui s’échappe de la bouche de Marika Hackman, tant le lien entre les deux paraît peu évident… et diablement triste. Le sur-consumérisme d’un côté, le sublime de l’autre. Comme une métaphore, pour la folkeuse et popeuse Marika Hackman, de ce qui a trait à la création pure — sa musique à elle — et la nécessité qu’elle a de la marketter, de la catégoriser, de la vendre. On soupire à cette idée en se souvenant des utopies pérennes qui murmurent aux créateurs.ices que l’art ne doit pas penser au fric, et à ces mêmes utopies qui se voient, relativement vite, rattrapées par le réel. Le cadi et la montagne. Un soupir, encore.
Marika Hackman (Site officiel / Instagram / X / YouTube / Facebook)
Brian McHenry (Site officiel / Instagram / X / Big Cartel)
Marika Hackman, Big Sigh, 2024, Chrysalis Records, 36 min., artwork de Brian McHenry.