Mermonte x Aloïs Lecerf — Variations


C’est à un proche du groupe que Mermonte a choisi de confier la conception de l’identité visuelle de son nouvel album, Variations. Formé autour de la figure du compositeur et multi-instrumentiste Ghislain Fracapane, le groupe rennais s’inspire du post-rock des ainés — Mogwai, Godspeed You! Black Emperor, Oiseaux-Tempête — ou du rock stadium des plus réputés — Arcade Fire, pour ne citer qu’eux — pour composer une musique qui sait prendre son temps, le regarder droit dans les yeux, et éclate un instant après avoir suggéré qu’elle ne le ferait peut-être pas, qu’elle choisirait la perspective inverse, là où le ciel reste calme et les horizons aussi.

Flots

Cette musique, et en avant-première — c’est le privilège de celles et ceux qui suivent une œuvre dès les prémices de la création —, Aloïs Lecerf a eu le temps de la disséquer, de l’entendre et de s’en imprégner avant de poser les premiers jalons de ce qui allait devenir la pochette de Variations, le nom de ce quatrième album dont le nom porte en lui toute la singularité de ce projet qui aime partir dans plusieurs directions, prendre des contresens, varier les humeurs.

À Aloïs Lecerf, graphiste et vidéaste rennais membre du collectif VoyonsVOIR (lives sessions, lives reports, pochettes de disques pour Kid Wise, After Marianne, Gwendoline…), les dix morceaux qui composent Variations évoquent les grands espaces qui se perdent dans les grandes eaux, les océans qui ont tout englouti, « la sensation d’être sous l’eau, de ne faire qu’un avec les éléments et les gens qui nous entourent ». C’est la logique des musiques capables de mêler les idées de patience et celle de fracas. C’est aussi la force de quelques titres qui, spontanément, conduisent l’imaginaire vers les flots, comme le morceau « Underwater » (« aquatique ») ou « Promised Land » (« terre promise »).

« Dès le début, j’ai eu cette base, avec le contour bleu, puis la typo très fine, toute simple, pour faire un petit clin d’œil aux anciens artworks », nous dit Aloïs, engagé pour contraster, mais sans rien renier, avec les précédentes pochettes du groupe.

Avec Aurélien Le Beau de VoyonsVoir, ils avaient proposé quelques mois plus tôt une live session encadrant une rencontre des morceaux « Underwater », « Variation » et « Rythme interdit » filmée depuis le Musée des Beaux-Arts de Rennes.

À propos de l’artwork, Aloïs poursuit : « En fouillant sur mon téléphone, je suis retombé sur cette photo que j’avais faite il y a plus de cinq ans. On y voit les deux pieds de mes sœurs dans une piscine, entre lumière et ombre. Il y a un côté rigolo dans cette photo quand on sait que mes sœurs sont jumelles, et que leur relation m’a toujours fasciné. Quoi de mieux donc, que deux êtres si connectés, pour évoquer le fait de ne faire qu’un face aux éléments ? ».

Vagues

L’idée d’Aloïs plaît à Ghislain, qui peut donc partir, dans la foulée, sur la création des pochettes des singles. Et parce qu’il ne fait pas partie de ceux qui parviennent à jeter une création antécédente sous prétexte qu’elle ne conviendrait plus à l’humeur du moment, pour ces singles, Aloïs recycle. Une amie photographiée sur un bateau lors d’un voyage en Asie (« It Won’t Last Long »), et un passant traversant à vive allure pour éviter les vagues lors d’une tempête à Saint-Malo (« Underwater ») : « j’estime que si on a créé quelque chose à un moment, c’est que cette chose avait du sens », dit-il, lui qui se montre donc confiant en cet équilibre, si fragile, qui pourrait bien exister entre ce que l’on crée de manière plus ou moins spontanée et l’idée que l’on souhaiterait donner une fois que l’acte de création a été accompli.

Mermonte (SoundCloud / Facebook / Twitter / Instagram / Bandcamp)

Mermonte, Variations, 2022, Room Records, photo d’Aloïs Lecerf, 30 min.