Floating Points x Akiko Nakayama — Cascade


Plasticienne adepte du dessin et de la peinture à l’huile, Akiko Nakayama, formée à la Zokei University de Tokyo, crée des formes et des figures qui pourraient s’apparenter à des « fontaines colorées », inspirées par ces flots de couleurs qui, lorsque l’on rince le pinceau, peuvent surgir en rafales.

Sa peinture mouvante, presque autonome si l’on considère que personne ne peut décider en amont de ce que donnera le mouvemente, a attiré le fleuron de la scène électronique tokyoïte, qui s’est parfois associée à Akiko en live, comme le fut par exemple le producteur japonais Ken Ishii.

Récemment, son travail a capté les regards de la vieille Europe et de la Grande-Bretagne, d’où le producteur et DJ Floating Points — pseudo du trentenaire mancunien Samuel Shepherd — fabrique une musique électronique planante, répétitive, jazzy, introspective.

Floating Points © Genevieve Reeves

Club aussi, parfois, comme sur Cascade, dernier album en date de cet artiste signé sur le prestigieux label indépendant Ninja Tune (Thundercat, Yaya Bey, Peggy You, Ross From Friends, Romare, etc.) qui associe le visuel de la japonaise et la musique du Britannique. Un visuel qu’Akiko Nakayama commente en exclusivité pour Néoprisme.

Bonjour Akiko. À quel moment as-tu commencé à travailler avec Sam Shepherd sur la réflexion de cette pochette de disque ?

Akiko Nakayama : Ce projet a démarré il y a environ un an et demi. J’ai parcouru quatre saisons avec la musique de Sam et de Cascade dans les oreilles !

Est-ce un rêve ?

Akiko Nakayama

Dans quelle mesure connaissais-tu la musique de Floating Points avant de commencer à travailler avec lui ?

Akiko Nakayama : J’ai connu la musique de Floating Points comme beaucoup de fans de musique dans le monde ! Sa musique est d’ailleurs particulièrement populaire au Japon, d’où je suis originaire. J’ai été particulièrement fasciné par son œuvre précédente, Crush, qui fut créée en collaboration avec Hamill Industries et a capturé la riche expression des surfaces des bulles. Je me souviens encore de ma réaction au moment où j’ai reçu le message de Sam, qui me proposait de travailler sur la pochette de cet album : « Est-ce un rêve ? » Et peut-être, en réalité, que je rêve encore maintenant.

Floating Points x Hamill Industries — Crush (2019)

Cette pochette, est-ce la réutilisation d’une peinture déjà existante ou est-ce une création originale pour Cascade ?

Akiko Nakayama : C’est une création originale ! Lorsque le projet a démarré, j’ai partagé 100 dessins, y compris des œuvres antérieures, avec l’équipe de Floating Points. Ces moments, c’était comme regarder et réfléchir à la carte d’une nouvelle aventure. Cependant, juste avant le début de la tournée, j’ai peint des séquences vidéo tout en écoutant la démo des tracks de Cascade alors que nous décidions progressivement de la direction à prendre avec l’équipe créative. J’ai donc dessiné la pochette en écoutant ces tracks.

Je m’intéresse aux formes qui apparaissent lorsque je combine des peintures aux propriétés différentes. La pochette est une forme créée par l’interaction des couleurs rouge et bleu.

Techniquement, comment as-tu fabriqué le visuel ayant donné naissance à cette pochette de disque ?

Akiko Nakayama : La pochette de l’album crée un motif de vagues en combinant deux peintures de granulométries différentes. C’est la même technique que le « Alive painting » que je fais sur scène. J’utilise une caméra macro pour enregistrer une zone aussi petite que la paume de ma main. Le monde dans lequel nous vivons est constitué d’un réseau complexe de phénomènes physiques et de matériaux, mais en le réduisant à la portée d’une loupe, nous pouvons en extraire des éléments visuels. Il s’agit d’une composition de peinture de phénomènes physiques sélectionnés.

Akiko, quel est votre rapport à la musique club ? Êtes-vous une fan de techno ? De house ?

Akiko Nakayama : J’ai commencé à collaborer avec des musiciens par le biais du jazz improvisé, puis je suis passé à la musique expérimentale et à la Japanoise (genre musical lié à la musique bruitiste japonaise, populaire dans les années 80 et 90, NDLR). Je collabore désormais avec plusieurs styles de musiques différents.

Mes souvenirs de musique club incluent une performance avec Ken Ishii, Satoshi Tomiie et Kuniyuki Takahashi et une expérience techno de cinq heures avec DJ NOBU. La techno est comme une architecture en évolution rapide. Cela semble solide, mais c’est invisible… parce que c’est sain. J’ai appris que le flux abstrait visible de ma peinture en son sein permet une excellente collaboration. C’est un super match, donc dessiner avec de la musique de club, pour moi, c’est amusant !

Selon vous, quel est le lien direct entre le nom de cet album, Cascade, et la pochette que vous avez créée pour lui ?

Akiko Nakayama : Le titre permet aux formes d’onde sur la cover d’être interprétées comme des images animées plutôt que comme des images fixes, et nous espérons que ce sera une introduction discrète à l’album.

Floating Points (Site officiel / Facebook / Instagram / YouTube)

Floating Points, Cascade, 2024, Ninja Tune, 58 min., cover art d’Akiko Nakayama.