The Horrors x Erik Ferguson – V


Le constat paraît évident : visuellement parlant, The Horrors n’a jamais aussi bien porté son nom qu’avec le packaging visuel entourant la sortie de V, le nouvel album des types de l’Essex, England. C’est que cet univers visuel, il s’est fait en collaboration avec le designer et vidéaste anglais Erik Ferguson, responsable d’une imagerie lugubre, visqueuse, anxiogène, pleine de monstres en état de décomposition (ou de re-composition, c’est selon), d’êtres issus d’une réalité déformée (ici, un pénis plus veineux qu’à l’accoutumée, , un troll un peu dégueu), de matières qui se rencontrent et fusionnent. Faire un tour sur le site officiel de Ferguson vaut sérieusement le coup, le garçon étant sérieusement créatif. Mieux vaut toutefois ne pas le faire avant manger.

Bizarrerie

Alors donc, The Horrors avec ce drôle de type-là. Et une collaboration qui accouche sur un artwork weird au possible, puisque celui-ci, en plus de proposer une marge rédigée en japonais (on se croirait ainsi confrontée à la couverture d’un manga, ou peut-être à un album de Grimes), intègre une construction plastique fusionnant les visages d’humains mal en point (peut-être sont-ce les visages des membres du groupe, méconnaissables, regroupée ici par la confrérie assassine des Sans-Visages de Game of Thrones ?), sorcellerie digne d’une imagerie SF (on pense un peu à certains plans de la saga Alien) faite d’un rose dégoulinant et compact. À l’esprit, aussi : le travail sculpté de Dave Konopka pour Battles (l’artwork de Gloss Drop surtout), celui de Jesse Kanda pour Arca (certains avaient d’ailleurs hurlé au plagiat lors de la parution de l’artwork de Machine), ou bien sûr du diabolique Chris Cunningham (Aphex Twin, Björk), qui s’y connaît en déformation des chairs, et en imagerie futuriste avec vision relativement négative des années à venir…Chris Cunningham qui avait d’ailleurs déjà travaillé avec The Horrors, période rock trash, sur le clip, encore une fois bien anxiogène, de « Sheena is a parasite » (2006).

The Horrors x Erik Fergusson – Machine

Reste à savoir la raison, de ces chairs et de ces visages regroupés en un seul et même tout. Doit-on comprendre cette mutation-là comme une référence à la mutation orchestrée par le groupe lui-même, lui qui, en cinq albums, eut le temps de passer du shoegaze mouvementé au rock psyché, du garage encavé à la pop quasi bodybuildée ? V, le cinquième album du groupe anglais, est désormais teinté de beats électroniques salasses, de beats étouffés, d’une pop plus électronique que jamais. The Horroros, ou l’histoire d’une perpétuelle réinvention de son propre soi ?

Le son

En dix ans, The Horrors se sont métamorphosés. Du rock rugueux de Strange House, leur premier album paru en 2007, les Anglais ont évolué vers une pop électronique qui tend autant vers le noir que vers le lumineux, un disque porté par la production XXL d’un garçon habitué aux grands espaces (Paul Epworth, qui a produit Coldplay ou Adele…), une collaboration venue statufier l’étiquette résolument « pop » du groupe. L’horreur pour certains, mais le bonheur, aussi, pour d’autres.

The Horrors (Site officiel / Facebook / Twitter / Instagram / Youtube)

Erik Ferguson (Site officiel / Instagram / Vimeo)

The Horrors, V, 2017, XL Recordings, 54 min., artwork par Erik Ferguson