Stand High Patrol x Kazy Usclef – Our Own Way


Scénographe, vidéaste, peintre, graffeur, fondateur du collectif Mortal Cobra (un « créateur d’images », en somme), Kazy Usclef fabrique l’ensemble de l’identité visuelle du collectif nantais Stand High Patrol, non pas depuis Mathusalem, mais depuis 2007 et la parution des premières affiches de ce groupe originaire de Bretagne mais influencé, depuis toujours, par les sound systems de Kingston, par le hip-hop de Compton, par le trip-hop de Bristol, par la techno de Detroit. Pas de frontières, que des passeports.

Pas de carcans. Pas de codes.

Kazy Usclef

Underground et hyper indépendant, le dub multiforme de ce groupe formé autour de Rootystep, Mac Gyver, Pupajim et Merry et autoproduit (les cinq albums du groupe sont parus sur le label Stand High Records) travaille « en famille » et en cercle non pas fermé, mais en tout cas réduit. « Avec Stand High Patrol, on est amis avant d’être collègues. Ça ne pourrait pas fonctionner autrement », dit Kazy, qui vit et travaille à Nantes, où il a basé son atelier, et qui partage avec le collectif une idée qui fédère : celle de se laisser la possibilité de la très grande liberté. Pour lui, dès lors qu’il s’agit de créer une image, c’est carte blanche. La relation est fluide, facile, fertile.

Stand High Patrol x Kazy Usclef – Midnight Walkers (2012)

Mélomane et même DJ à l’occasion, Kazy « travaille les images avec la même approche qu’eux travaillent la musique. Pas de carcan, pas de codes ». Joint par téléphone, il affirme : « Je prends des virages dans mes images comme eux prennent des virages dans leurs sons. On se renouvelle autant que possible ».

Virages

Alors, dès qu’un nouveau disque est envisagé, Kazy arrive dans la boucle. S’il ne fait pas fondamental partie de Stand High Patrol, de loin, on pourrait s’y méprendre. Rapidement et avant tout le monde, il écoute les nouvelles compositions d’un groupe qu’il accompagnera même le plus souvent, dans un second temps, en tournée. La phase de titrage du disque, aussi, est fondamentale. « Mon boulot, c’est d’illustrer leur musique. Ce n’est pas évident, il faut que je sois attentif. Mais je ne suis pas dans quelque chose d’ultra littéral. J’essaye, en écoutant leur musique, de trouver une évocation à ces images… et je me prends parfois bien la tête sur la connexion qui pourrait exister entre la musique qu’ils sont en train de créer et les images que je vais créer de mon côté ! Ces images, je peux passer six à neuf mois à cogiter dessus. »

Dans les cieux, des silhouettes — des spectres, ou peut-être les enfants de Peter Pan ? — traversent et survolent la ville qui se dessine en dessous. Pour constituer le visuel de Our Own Way, cinquième album du groupe dont le rendu nous rappelle les images de Cédric Virassamy, proposées pour un autre label qui place l’idée de liberté au centre de tout — le label Rue de Plaisance —, Kazy a fait appel à l’alliance basique du noir et du blanc afin, justement, de revenir aux bases. « Sur l’album, il y a des morceaux roots, hip-hop, une certaine forme, pour eux, de retour aux sources. Alors moi aussi, je voulais revenir aux sources ».

« L’image de l’humain en train de voler revient régulièrement dans mon travail. Il y a cette idée de rêve et de grande liberté, cette volonté de ne pas rester terre-à-terre, revendiquée dans mes images comme dans la musique de Stand High Patrol. »

Stand High Patrol x Kazy Usclef – A Matter Of Scale (2015)

« Techniquement, à la base, cette image est une gravure avec des petites techniques proches de la linogravure. Toutes les images liées à cet album sont constituées de cette manière. Tout est fait à la main, et le numérique n’intervient qu’à partir du moment où l’on doive scanner les images. »

L’artisanal, le numérique

Le numérique, chez Kazy et Stand High Patrol, il intervient tout de même un peu, puisque sur ce disque-là, chaque morceau a été illustré par une animation proposée en vidéo, un travail mené dans la main avec Charlie Mars, réalisateur de court-métrage et collaborateur de Kazy depuis longtemps. À Nantes, ils ont tous les deux appris le métier sur le tas. « On co-écrit, on co-réalise et sur l’animation, on bosse vraiment le plus souvent à deux ».

« Le premier clip qu’on a proposé avec Charlie, c’était de la gravure animée via le logiciel Adobe After Effects. Pour fabriquer le clip de ‘’My research’’, Charlie et moi nous sommes enfermés pendant trois semaines ! Et on a fini par proposer une animation pour chacun des morceaux de l’album… Ça a été une très grosse extase de travailler sur ce projet ! »

Le son

Our Own Way. « Notre propre chemin ». Le nom de ce nouvel album de Stand High Patrol, qui ferait une épitaphe parfaite, résume l’intention globale de ces Nantais ouverts d’esprits et créateurs d’un son qui est avant tout le leur. Ici, sur ce cinquième album studio, le groupe mêle la musique dub, reggae, hip-hop, jazz, G-funk, et même rocksteady sur des morceaux qui rendent un nouvel hommage aux terres jamaïcaines et surtout, à ceux qui savent en explorer d’autres, des terres où se trouvent le chemin vers le grand métissage.

Stand High Patrol (Site officiel / Facebook / Twitter / Instagram / YouTube / SoundCloud)

Kazy Usclef (Facebook / Instagram)

Charlie Mars (Site officiel)

Stand High Patrol, Our Own Way, 2020, Stand High Patrol Records, 67 min., artwork de Kazy Usclef