Caroline Polachek x Aidan Zamiri – Desire, I Want to Turn Into You


Figure de plus en plus importante de la pop alternative internationale, la New-Yorkaise Caroline Polachek propose, depuis la fin de Chairlift (2005-2017), une musique d’une richesse en perpétuelle évolution. Certains l’appellent hyperpop (l’interstice étroit entre la musique savante et mainstream) et d’autres pop patchwork, dans la mesure où elle convoque, au sein du même écrin, des lueurs de musiques trip-hop, funk, chorales, flamenca, ou même de folk celtique. Le genre de musique qui part des marges, passe par l’entre-deux, flirte avec les humeurs du grand public et les fréquences des radios à audience. Toucher les foules avec de la musique loin des moules. Celles qui y parviennent sont rares et Caroline Polachek fait partie de celles-là.

Jeu de piste

La pochette de ce second album de Caroline Polachek suit la même logique. Entre le grand public et la petite niche, il y a ce travail signé du photographe Aidan Zamiri, qui marque l’esprit et soutient le titre, particulièrement évocateur, de cet album paru sur le label Perpetual Novice : Desire, I Want to Turn Into You.

Outre une lecture très littérale qui consisterait à voir dans la gestuelle d’une artiste en train de ramper sur le sol (d’un métro ancien que l’on peut visiter à Londres au London Transport Museum) une manifestation de ce désir formulé dans le titre, on décidera plutôt de voir cette pochette de disque comme la mise en forme d’un jeu de piste, voire d’une carte aux trésors qui donnerait accès à l’entrée de cette île dont Caroline nous souhaite, et dès les premières mesures de l’album, la bienvenue (“Welcome to my Island”).

Un jeu de piste dans lequel les indices seraient parsemés aux quatre recoins d’un visuel que seuls les véritables connaisseurs de la discographie et filmographie de la new-yorkaise pourront correctement localiser, comprendre, repérer.

Sable, fourmis, volcans & lapinous

D’abord, le sol sableux (inhabituel dans un wagon du métro londonien…), qu’on doit voir comme une référence au sable qui entoure le plus souvent les îles, comme celle sur laquelle nous sommes invités, on le redit, à pénétrer (“Welcome to my Island”). Basique.

Puis le “dessin cru d’un ange”, littéral, qui apparaît au plafond du wagon, au centre de l’image, et réfère littéralement au titre “Crude drawing of an angel”.

Aussi, l’autocollant Vesuvius”, collé au siège en bas à gauche de l’image, qui renvoie aux paroles de la chanson “Smoke” (“It’s just smoke, floating over the volcano”), et ceux collés cette fois en haut en dessous du plan du métro, qui renvoient aux titres “Bunny is a rider” ou “Sunset”.

Il y a aussi ces fourmis que l’on retrouve en file indienne sur le sable après les avoir retrouvées sur un paquet de photos de presse de Caroline, prêtes à s’infiltrer dans les recoins métalliques du métro londonien. Elles peuvent quant à elles représenter à la fois l’abondance et le désir de destruction (elles sont en effet des “Billions”), thématique de la chanson précédemment citée.

Enfin, outre ces quelques symboles et ces indices parfois largement alambiqués que l’on peut détecter ici et là, une ou deux évidences. Dans le fond, mêlé à la foule, on reconnaît en effet Danny L Harle, producteur d’un disque auquel a également participé sa fille Nico Harle, dont la voix avait été échantillonnée pour les besoins du single “Bunny is a rider”.

D’ailleurs, et parce qu’il ne faut pas toujours brouiller les pistes, mais parfois, les rendre plus visibles, Nico est justement vêtue de collants à imprimés lapins… et tient dans sa main un lapin en peluche.

Sur le web, certains ont également cru voir sur cette pochette la présence du producteur Sega Bodega (dont on analysait la pochette de l’album Salvador en 2020), auquel on doit la production du tube hispanisant “Sunset”.

Ce seraient en effet ses chaussures que l’on verrait au premier plan de cette pochette décidément pleine de pistes à explorer pour celles et ceux qui voudront bien prendre le temps de s’y plonger.

Caroline Polachek (Site officiel / Facebook / Twitter / Instagram / YouTube)

Aidan Zamiri (Site officiel / Instagram)

Caroline Polachek, Desire, I Want to Turn Into You, 2023, Perpetual Novice, 46 min., pochette d’Aidan Zamiri (photo)