Wax Machine x Andrew McGranahan — Hermit’s Grove


Des chants d’oiseaux qui se prélassent. Une flûte qui se détache. Et puis des percussions, un synthé et bientôt une voix, celle de Lau, caressante et appliquée.

Il chante en anglais sur une ambiance qui rappelle plutôt la bossa nova et la vague tropicália brésilienne qui, au cœur des années 60 et après le coup d’État de 1964, avaient fait se rencontrer les musiques du Brésil et celles qui, plus au nord, orientaient USA, Canada et les cousins européens vers le psychédélisme, le folk, le jazz, la pop. Un vent de liberté, d’ouverture d’esprit et de mixité dans un pays où l’air, alors, se raréfiait.

Sixties

Les oiseaux, la flûte, le tropicalisme des terres brésiliennes. Et ce titre, « Guardians of Eden », qui ouvre l’album Hermit’s Grove, conçu par un artiste de Brighton qui a, dans le sang et dans la tête, quelques restes du Brésil de Vinicius De Moraes, Os Mutantes, Baden Powell ou Caetano Veloso. Le morceau ouvre le disque et semble avoir été la source d’inspiration centrale, par son titre et par son sujet — les gardiens du jardin d’Éden —, de l’illustrateur Andrew McGranahn, engagé par les Wax Machine pour proposer un environnement visuel à cet album indéniablement marqué par les lévitations sensorielles des sixties et seventies.

Wax Machine

Comme dans un immense trip psychédélique, vous trouverez donc sur cette pochette de disque ce que vous aurez envie d’y voir. Dans le désordre ? Une créature mi-poisson, mi-humain, qui symbolise sans doute l’évolution allant de l’un à l’autre. Un ermite barbu (celui du « bosquet », « grove » en anglais ?) avec, au niveau du front, un troisième œil. Dans sa main gauche, la pomme et à quelques centimètres de lui, qui guette et puisqu’il faut bien rappeler très concrètement le jardin d’Éden : un serpent. Dans son autre main — ou plutôt, en lévitation au-dessus d’elle —, se tient cette fois un globe, où l’on pourra distinguer à la fois l’Angleterre (et si l’on y zoomait beaucoup, la ville de Brighton) et l’immense pays brésilien. Derrière eux : le soleil qui se lève, les montagnes qui se dessinent, un ciel bleu, un étang qui l’est tout autant, une végétation digne du país tropical que chantait Jorge Ben Jor en 1969.

Zen

Beaucoup de zen et potentiellement, une sacrée gueule de bois à venir pour celui qui se réveillera, dans quelques heures, après avoir imaginé pendant la demi-heure que dure cet album sorti sur Batov Records (Şatellites, Sababa 5) un ermite assis comme un moine tibétain porteur de trois yeux…

« Le Brésil est l’endroit où je suis né et où j’ai grandi jusqu’à l’âge de 8 ans, et c’est d’où vient ma famille. Nous avons ensuite immigré en Europe et je n’ai jamais pu visiter le Brésil après cela, car c’est un vol très cher. Au lieu de cela, j’ai opté pour la meilleure chose suivante qui est de se connecter avec l’esprit et la culture du Brésil via le médium de la musique », déclare Lau, non pas depuis une quelconque cellule de dégrisement de Copacabana mais au sein d’une bio Bandcamp, le tout afin de révéler les raisons de cette odyssée psychédélique dans le pays de ses ancêtres, de la végétation tropicale et des couleurs éclatantes.

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Andrew McGranahan (Instagram)

Wax Machine, Hermit’s Grove, 2022, Batov Records, 31 min., artwork d’Andrew McGranahan