Tamburi Neri & & Hiroko x Lena Mačka — Ombre


Une musique incantatoire, mystique, possédée, lointaine puis plus proche, toujours plus (juste ici !), qui percute les sens, s’y immisce, rentre à l’intérieur, y demeure encore, le temps de trois quarts d’heures qui pourraient être des jours si l’on parvenait à libérer suffisamment l’esprit, et à lui permettre de se confondre définitivement dans le grand tout, dans le grand rien, dans une manière plus organique de s’ouvrir afin de ne plus jamais devoir se refermer. Voilà Tamburi Neri, duo milanais qui fait de la musique comme le ferait un duo de chamanes venu des tréfonds de la terre afin d’y ramener le son d’une civilisation ancienne, le genre à être parvenue à comprendre, mieux que celles que l’on connaît en 2021, la voix vers une autre perception du monde. Des sous-sols, ils ont extraits une Ombre, obscure et menaçante pour les esprits qui auraient peur du noir mais pas pour ceux qui y verraient l’assurance qu’il existe aussi la lumière. Ils l’ont ramené à la surface, l’ont extrait de la caverne, l’ont libérée afin qu’elle puisse enfin s’exprimer pleinement et dire enfin aux autres que l’ombre compte au moins autant que la silhouette qui l’a engendrée. « Giochi d’Ombre » (« Jeux d’ombre »), « Il Buio » (« L’obscurité »), ou « This is the End » (afin de référer nettement à l’un des morceaux les plus ombrageux, quoique l’un des plus célèbres, de la discographie des Doors) : voilà les pistes que lancent Tamburi Neri, bien aidés par la voix, elle aussi venue des sous-sols, de la chanteuse Hiroko.

Le cinquième élément

Tamburi Neri. Si le duo vient de Milan, c’est plus à l’est, en Inde par exemple, qu’il trouve une partie de ses influences iconographiques. Le serpent d’abord (ici, c’est un cobra) joue depuis longtemps un rôle-clé au sein de la religion et philosophie bouddhiste, de même que le Trishula, ou trident, associé à la divinité Shiva, l’un des trois dieux primordiaux hindous. Au trident, le groupe a également associé le tambourin et le cor afin de « symboliser la musique », comme nous l’écrit le groupe.« Le troisième élément est l’échiquier qui représente la vie, ses mouvements ou ses choix et le quatrième est le soleil, qui est l’énergie vitale et dans ce cas nous ramène également à notre princesse du soleil levant ‘Hiroko’ », écrit aussi un groupe qui aura pu compter sur le travail d’une artiste native de Valence (dans la Drôme) mais résidente lyonnaise, Lena Mačka, illustratrice autrice d’une œuvre introspective, spirituelle, emplie de symboles et d’un puissant sentiment global d’apaisement. L’œuvre de Lena Mačka questionne les tréfonds du cerveau et s’inscrit parfois aussi sur le corps, puisque certains de ses dessins deviennent parfois des tatouages gravées sur les peaux des autres. Comme quoi certains savent les mater, les ombres, ou en tout cas s’habituer à leur présence qui englobe tout, et qui double, toujours, les propres représentations que l’on peut avoir de soi-même. Tamburi Neri (Facebook / Instagram) Lena Mačka (Site officiel / Instagram) Tamburi Neri, Ombre, 2021, Worst Records, artwork de Lena Mačka