Swervedriver x Spencer Bewley – Future Ruins


Future Ruins. Les futures ruines. Le titre du nouvel album de Swervedriver (membre, avec Slowdive, My Bloody Valentine ou Ride, de la scène shoegaze anglo-saxonne des années 90), évoque déjà en soi le tragique, et la perspective d’un Après irrémédiablement tourné vers une destruction, totale ou éphémère, que l’Humanité, toutes époques et toutes civilisations confondues (des Mayas aux Chrétiens, de Nostradamus à Roland Emmerich), anticipe et envisage depuis toujours. Parmi les 10 000 occurrences qui auraient permis aux Britanniques d’illustrer ce thème-là (qui peut aussi, bien entendu et puisque l’on parle dans 95% de cela en musique, évoquer la destruction programmée d’un amour potentiel), Swervedriver a pris le parti de convoquer l’image d’une fête foraine qui serait tombée, déjà, en désuétude totale. Pour évoquer le silence définitif, quoi de mieux que de se tourner vers ce qui, hier encore, riait tellement fort ?

The Day after Tomorrow

Ici, sur cette très belle photographie signée par l’Anglais Spencer Bewley, on axe donc l’objectif sur Coney Island, quartier résidentiel de Brooklyn, à New York, qui se mute, une fois les beaux jours venus, en véritable base de loisirs. Dans les guides touristiques, on juge indispensable un passage sur la la roue Wonder Wheel, et aussi dans Luna Park, parc d’attractions pourvu d’un parcours de montagnes russes célèbres (celles-ci sont même classées au Registre national des lieux historiques en tant que National Historic Landmar), le Cyclone. Et puisque même ici, le présent semble avoir acté de perspectives nouvelles, pour Adam Franklin and Co, ainsi, il n’y a pas d’autres conclusions possibles : la fête, dans ce futur que l’on anticipe déjà, est belle et bien terminée.

Le son

Après de longues années de mutisme, les membres de Swervedriver étaient revenus il y a quatre ans avec I Wasn’t Born To Lose You, un album au très joli titre et au contenu qui rappelait que le groupe d’Oxford avait continué, entre les quelques vingt années qui séparaient la sortie de 99th Dream en 1997 et leur retour en 2015, à réviser les fondements d’un genre, le noisy pop, dont ils avaient contribué à jeter les bases, aux côtés de Slowdive, de Ride, de My Bloody Valentine. Et force est de constater, avec la parution cette année de Future Ruins (qui est donc le sixième album du groupe), que la formule, ici, n’a pas changé, et que le groupe, plutôt que de tenter un renouvellement toujours risqué, et parfois franchement vain (lorsque l’on sait bien faire quelque chose, pourquoi s’épuiser à vouloir le faire autrement ?), continue à construire des murs de guitares, à faire tourbillonner la batterie, à hurler l’amour du rock à outrance, versant pop. Et puisque ces Anglais-là évoquent déjà les ruines de demain qui prennent racines, déjà, aujourd’hui, autant leur donner tout de suite raison : en musique ou autre part, autant mourir avec ses idées.

Swervedriver (Site officiel / Facebook / YouTube / Instagram)

Swervedriver, Future Ruins, 2019, Rock Action Records, artwork par Spencer Bewley