Surfer Blood x Deva Freelander – Snowdonia


De l’importance d’illustrer, en 2017, un disque que l’on vient de faire paraître avec une image présentant la magnificence menacée du continent Antarctique. Une image frontalement écologiste, bien entendu, par les problématiques que celle-ci sous-entend (le réchauffement climatique qui menace l’éco-système de la région glaciaire, et par filiation, toutes les autres). Et poétique aussi, parce que la culture populaire a voulu conférer au cercle polaire, et à ses interminables habitats de glace quasiment immaculés de toute présence humaine (si ce n’est quelques scientifiques passionnés, et quelques touristes fortunés en croisière), une dimension romantique héritée des visions les plus sensibles du XIXe siècle (l’ode à la nature souveraine, à la solitude salvatrice, et aux tristesses semblables, en quelques points, à ces vastes terrains de glace).

La glace au sens propre, et au figuré ?

L’Antarctique, c’est ainsi le symbole qu’a décidé de faire figurer Surfer Blood – pas spécialement branchée glaçon jusqu’ici – sur la cover de ce 4e album, où figure notamment le titre « Frozen » (il y a là une logique) et qui utilise le travail de la plasticienne new-yorkaise Devra Freelander, conceptrice de sculptures aux frontières de la géologie et de la technologie et grande connaisseuse de ces environnements où la glace gouverne en maître incontesté, puisqu’elle a effectué plusieurs voyages en Islande et en Antarctique. De l’autre bout de la Terre, elle a ramené, en plus d’une vision bouleversée du monde, une série de clichés montrant l’immensité de ce continent plus vaste que l’Europe, dont cette photo qu’il faudra peut-être comprendre, aussi, dans un propre plus figuré.

On se rappellera en effet le drame intervenu dans la vie du groupe il y a quelques mois (le guitariste Thomas Feket, vaincu par un cancer), et la possibilité d’un rapport entre cette tragédie et, symbole souvent utilisé, cet immense bloc de glace, qui deviendrait alors le réceptacle d’une tristesse pas encore tout à fait gérée. Laissons la place, alors, à l’incertain.

Le son

On aurait pu s’attendre, avec le terrible drame tout juste évoqué, à un album d’une teneur différente de ce qu’avaient proposé jusqu’ici ces Californiens projetés, depuis quasiment 10 ans, dans l’élaboration d’une indie pop branchée et décontractée, dans la lignée de ce savent faire une partie de leurs confrères de langue anglaise (Real Estate, Beach Fossils, Cloud Nothings, Yuck…) Le 4e album de Surfer Blood ne vrille au contraire pas d’une corde, et plutôt que de s’apitoyer sur le sort qui lui a été réservé, présente une nouvelle série de pop-songs, toujours étirées entre psychédélisme gentil et shoegaze mélodique. Il fait froid à l’extérieur, mais si chaud à l’intérieur.

Surfer Blood (Site officiel / Facebook / Twitter / Youtube )

Devra Freelander (Site officiel / Instagram)

Surfer Blood, Snowdonia, 2017, Joyful Noise Recordings, 38 min., pochette par Deva Freelander