Matt Elliott x Samantha Torrisi — Farewell To All We Know


Farewell To All We Know, « Adieu à tout ce que nous savons », dit ce nouvel album de Matt Elliott, songwritter folk originaire de Bristol jadis connu pour ses talents de producteur électronique au sein de The Third Eye Foundation — où l’on parlait alors de trip-hop, puisque cette musique venait de là où le genre été né. Voilà le titre aux perspectives lugubres, ou existentielles peut-être, de ce musicien empli de spleen et d’accords qui magnifient le ressenti des poètes (une guitare flamenca, un bandonéon, et des ambiances crépusculaires), qui illustre ce nouveau disque d’une image renvoyant, elle aussi, de paysages incertains.

Dark

L’ombre solitaire qui rôde autour des communautés humaines, qui y traîne même parfois la vague à l’âme et la bouche dans le Scotch (la pochette de Drinking Songs, magnifiquement illustrée par Uncle Vania) et qui se laisserait presque tentée, dans les petits moments de faiblesse, par l’idée de demeurer aux côtés de ses semblables : voilà Matt Elliott, semblable à ce qu’il incarne sur la scène folk électronique britannique (certains parlent de slowcore et ils ont sans doute raison) et à ce qu’il évoque sur cette peinture de la sicilienne Samantha Torrisi, autrice d’une œuvre qui confronte le spectateur à une vision de l’existence humaine en constante évasion, en constante recherche,  en constante transformation.

Sur la pochette de Farewell To All We Know, une silhouette rôde mais que personne, pour autant, ne s’inquiète : car puisque c’est à travers un bois certainement épais que circule ici Matt Elliott — ou du moins, puisqu’il s’agit d’un disque solo, celui auquel on associe naturellement la personne de Matt Elliott —, c’est bien à l’intérieur de son subconscient qu’il se balade, lui qui explore encore et encore, sur dix morceaux et une quarantaine de minutes, un intérieur mental précaire (« What Once Was Hope », « Crisis Apparition », « The Worst is Over ») et une croyance fragile en l’existence de lendemains moins gris que ce qu’implique cette image qui pourrait être issue d’un rêve tout autant que d’un cauchemar. La vision du monde dépend de ceux qui le regardent alors, laissons les esprits ciseler leurs propres visions du chaos. Celui qui relève ou bien celui qui couche.