Kelela x Hendrik Schneider – Raven


Au milieu des flots émerge un visage. Il a remonté après que ses poumons se sont gonflés d’air. Un vestige qui referait surface et refuserait de végéter plus longtemps dans l’obscurité des profondeurs sous-marines ? À moins que ce visage fermé, sans paupières, sévère, il n’ait pas encore coulé, qu’il flotte. Retenons cette option-là, plutôt. Car le message de l’Américaine Kelela, transmis sur son second album Raven, n’est pas celui d’un naufrage.

Kelela

Loin de l’image du navire qui coule, il faut en réalité regarder cette création du très cool photographe londonien Hendrik Schneider comme l’idée de celle qui, malgré la violence des tempêtes, est parvenue à enfiler le gilet de sauvetage. Et à vivre.

Instagram de Hendrik Schneider

Autonomie & guérison

Via Warp Records, le label londonien d’avant-garde sur lequel elle est signée, on peut en effet lire que Kelela Mizanekristos, sur Raven, explore “l’autonomie, l’appartenance et le renouvellement de soi comme guérison”. Penser, composer, jouer, interpréter sa propre musique. Poser des mots, des sons, des émotions sur les pensées qui, accumulées, peuvent parfois submerger. Et par ce biais, se trouver soi-même, enfin, et pour de bon. L’amour, évoqué dans le tube phare du disque “Enough for love”, peut alors se présenter plus facilement.

Un amour qui peut permettre de sortir, et l’expression est adaptée, la tête de l’eau. Car cet album, et comme l’affirme cette native de Washington, il a été entrepris avec, dans un coin de la tête, ce “sentiment d’isolement et d’aliénation ressenti en tant que femme noire”. Le racisme systémique ressenti comme une oppression qui étouffe. Et combattu en composant sa propre dance music (un mix de grime, de R&B, de 2step, de transe) qui ne sera cette fois, et parce que cette musique est bien la sienne, récupérée ni par le post-colonialisme, ni par le patriarcat, ni par personne d’autre. Car Raven, ajoute enfin Kelela, est son premier souffle. Celui qui trouve sa source “dans le noir”.

Kelela (Site officiel / Facebook / Twitter / Instagram / YouTube)

Hendrik Schneider (Site officiel / Instagram)

Kelela, Raven 2023, Warp Records, 62 min., artwork de Hendrik Schneider.