Florence + The Machine x Tom Beard x Brian Roettinger – How Big How Blue How Beautiful


Florence + The Machine - How Big How Blue How Beautiful

Si de ses artworks aux imaginaires baroques semblaient naître des lapins fantasmagoriques et des princesses esseulées au fond d’un bois, le troisième album studio de Florence Welch s’illustre à travers une photo franche noir & blanc, comme un retour aux sources sans fioriture ni détour.

Mi Ange mi démon

C’est après trois ans et demi d’absence des charts que Florence + The Machine, la chanteuse et leadeuse britannique Florence Welch revient entourée de ses musiciens aux arrangements lyriques et lunaires.

L’album en main, le regard droit, Florence Welch attrape notre regard sous l’objectif fidèle de Tom Beard. Deux yeux incitatifs se braquent sur le spectateur, l’invitant à écouter la galette sans somation. Et à l’écoute du morceau en préambule « Ship to Wreck », le constat est le même, cet album nous saute à la gueule, sans aucun détour, de façon très direct, grâce à des mélodies hyper efficaces et tout à fait pénétrantes. Dans cette magnifique photo, on a la sensation des regards omniscients des modèles en peinture qui semblent, quel que soit l’endroit où l’on se place, soutenir le regard et nous observer, se gardant bien de dire ce qu’elle pense du monde mais laissant les autres l’imaginer. Florence Welch serait-elle une Joconde dévergondée qui distillerait comme le paysage sombre qui entoure l’icône de Leonard de Vinci, des univers tourmentés ? Quelque chose de mystérieuse surgit en tout cas, façon La Jeune Fille à la Perle, qui nous invite par ses deux yeux foudroyants à chercher ailleurs.

Du lâcher prise haut de gamme

Une pose à la fois figée et terriblement naturelle dans un geste en mouvement, comme une évidence. Et cette spontanéité qui accompagne l’œil du photographe dans une intimité certaine avec la chanteuse se ressent dans la spontanéité du chant qui se fait puissant et extrêmement maîtrisé de bout en bout, comme dans la course effrénée « What Kind of Man ». Une rage jetée sans fioriture, qui comme le regard appuyé de la cover parle de sentiments ardents présents, d’une rupture dévastatrice. En comparaison aux artworks précédents qui nous mènent vers des contrées pailletées aux costumes oniriques, ici, Florence Welch apparaît dans la simplicité, dans l’évidence.

Et comme une vraie renaissance, l’album regagne des cieux ultra nobles, grâce à des mélodies toujours aussi nourries et superbement habillées de cuivres comme pour le titre éponyme « How Big How Blue How Beautiful ». Un lâcher prise merveilleux où l’on retrouve pleinement la Florence + The Machine des débuts. Sensible et puissante, elle nous renvoie toute sa fougue au visage et son insolence rafraîchissante. Et cette envie de défier la vie par la musique se ressent également à travers l’artwork qui évoque les poses lancinantes des héros de protest songs comme Joan Baez ou  Bob Dylan. Une regard à la fois provocateur et lasse, qui colle parfaitement aux paroles métaphoriques et tourmentées de la chanteuse britannique.

Caverne aux merveilles encore

Si la simplicité fait écho à cette efficacité rythmique pop soul retrouvée, on ne perd pas pour autant tout le lyrisme qu’on connaît à Florence + The Machine qui nourrit toujours ses compositions d’épopées conquérantes comme le prouve le titre « Queen of Peace », un vrai coup de génie. A travers tout l’univers graphique de cet opus réalisé par Brian Roettinger, qui s’illustre en lettres dorées et symbole à mi-chemin entre l’œil divin et l’esthétisme des Pink Floyd, offre cette porte ouverte sur ces rêves toujours sur le fil, à la frontière d’un cauchemar où monstres marins et peurs humaines se croisent. Et la multitude de photos qui habillent l’intérieur du livret raconte une histoire fantastique dans des contrées lointaines, perdus dans des terres écossaises aux accents mystiques. Dans les très cinématographiques clips dispersés sur la toile, on retrouve également ces imaginaires très travaillés qui nous font partir loin vers des lacs gelés sur lesquels licornes et sirènes vogueraient vers des cieux meilleurs. Un album et un artwork sous forme d’uppercut émotionnel décomplexé qui saisit, sans condition.

Le son

En explosant les charts en 2009 avec leur premier opus LungsFlorence + The Machine ont véritablement bousculé la pop anglaise en y ajoutant des touches baroques teintées de cuivres et de harpes, soutenues par la voix soul de Florence Welch. Dans ce troisième album studio How Big How Blue How Beautiful, on revient aux sources à travers des morceaux ultra-mélodiques qui évoquent une rupture dévastatrice et rappelant toujours et encore des influences à la PJ Harvey ou Kate Bush.

Florence + The Machine (Site Internet/Facebook/Twitter)

Tom Beard (Site Internet)

Brian Roettinger (Site Internet)

Florence + The Machine, How Big How Blue How Beautiful, 2015, Island Records, 1h09 min, pochette par Tom Beard et Brian Roettinger.