Dj Shadow x Paul Insect – The Mountain Will Fall


Dj Shadow x Paul Insect - The Mountain Will Fall

Déjà créateur de l’artwork de The Outsider, cet album qu’il avait dû illustrer en 2006 via ce jeune garçon sapé comme Zorro (masque posé sur le nez, cape noir et chapeau) et portant un vinyle dans chacune de ses deux mains (et qui rappelait en cela le tout premier, celui d’Endtroducing….), Paul Insect est de nouveau le créateur du visuel de The Mountain Will Fall, le 5e album de DJ Shadow, sorti chez Mass AppealBelieve Recordings.

Littéralité et métaphore

Relativement adepte, lorsqu’il doit se prêter à l’exercice de la pochette de disque, de traductions littérales, le street artist londonien, proche de Banksy et adoubé depuis longtemps par l’omnipotent plasticien britannique Damien Hirst (« I can’t pretend I’m not in love with Paul Insect a little bit, but not in a gay way »), illustre ainsi The Mountain Will Fall par le biais d’une montagne que l’on voit, effectivement, en train de tomber. Et sur la face d’un humain qui plus est (il aurait été étonnant qu’un tel déplacement rocheux ne fasse aucune victime collatérale au passage). Un humain orné d’une couronne qui, le choc étant ce qu’il est, laisse échapper la couronne qui était encore (on le devine) posée sur sa tête quelques instants auparavant.

Accident dommageable pour métaphore évidente : la montagne qui tombe sur le type couronné, et la constitution du visuel rappelle évidemment ces panneaux de signalétique mettant en garde contre le danger d’une électrocution risquée (comme sur le Big Dream de David Lynch, dont l’artwork de Paul Insect s’inspire quand même d’ailleurs très largement…), elle dit le caractère éphémère de toute chose, la dangerosité d’une quelconque position plus ou moins sur-élevée (dans son imaginaire ou dans celui des autres), et même pour celui jugé (ou jugé par autrui) éminemment tout-puissant. Pourquoi pas aussi, une signification un peu politique (l’état chancelant du capitalisme gouvernant), voir même carrément écologique (la nature qui se retourne contre l’humain couronné. Quoi qu’il en soit : la possibilité que ce qui n’est pas censé bouger, finisse par s’effondrer.

David Lynch - The Big Dream

David Lynch – The Big Dream

La couronne de Shadow ?

Et si l’on veut psychologiser un peu le propos, on peut très bien voir aussi ici, et plus qu’une référence à ce qui est universel, une référence à quelque chose de plus personnelle. Et ne pas exclure la possibilité que Josh Davis (le nom de Shadow dans le civil), et la teneur des interviews récemment accordées tend à confirmer cette impression, n’aurait pas encore tout à fait digéré les critiques très durement formulées à l’encontre de son The Outsider, d’autant plus que, et on le rappelle, c’est déjà Paul Insect qui avait réalisé l’artwork de cet album-là…La montagne pour dire la carrière, la couronne pour dire l’immense succès de ses deux premiers disques, la chute pour dire les quelques petites difficultés qui ont suivi. Ça se tient. Et ça risque de faire mal, si cette chute ne s’interrompt pas au moment propice.

Le son

« Je ne veux plus être le mec aux samples ». Mais définitivement, le mec aux prods ? Sur ce 5e album, et après les succès mitigés des deux précédents, DJ Shadow se relance via un disque marqué par quelques collaborations aussi percutantes qu’inattendues. Celle de Run The Jewels bien sûr sur l’explosif « Nobody Speak », celle de Matthew Halsall (« Ashes To Ocean »), et aussi celle du compositeur et producteur électro-classique Nils Frahm ( « Bergschrund »). Pas encore le moment d’annoncer la chute définitive de ce sommet-là.

DJ Shadow (Site officiel / Facebook / Instagram / Twitter / Youtube / Soundcloud)

Paul Insect (Site officiel / TumblR / Instagram / Twitter)

DJ Shadow, The Mountain Will Fall, 2016, Mass AppealBelieve Recordings, 49 min., pochette par Paul Insect