C Duncan – Architect


C Duncan – Architect

À la fois architecte et maçon de son propre édifice, le jeune Écossais Christopher Duncan (que le pseudo artistique a transformé en « C Duncan ») a pensé, façonné et assemblé l’intégralité des pièces sonores qui composent son premier album studio (très justement nommé Architect), ajoutant une à une et avec une minutie d’orfèvre chaque couche, chaque instrument, chaque arrangement, chaque voix de ce premier disque pop et folktronica sorti chez le label indé britannique Fat Cat Records. Bâtie dans l’intimité totale d’une chambre d’étudiant, la démarche constitutive du projet rappelle celle d’un autre talentueux rêveur, celle de Trevor Powers, qui avait construit le premier album de son projet Youth Lagoon de la même manière. L’exigeant compositeur, qu’on se le dise, n’est de manière générale jamais mieux servi que par lui-même.

Bâtisseur de son, bâtisseur d’images

C’est cette faculté de « grand bâtisseur » qui paraît devoir justifier la série de visuels entourant l’album (les pochettes des singles sont dans la même logique que le LP), une série aux allures de polaroïds peints depuis le ciel, panoramas enregistrés dans le cockpit d’un hélicoptère imaginaire, aux côtés d’un Yann Arthus-Bertrand qui serait soudainement devenu sensible aux paysages urbanisés offerts par la cité portuaire de Glasgow. Car c’est bien de la ville la plus grande et la plus peuplée d’Écosse, surtout regardée ici via les routes et le béton qui la constituent, que s’inspirent ces clichés, réalisés, parce qu’il est décidément d’une polyvalence et d’une activité remarquable, par C Duncan lui-même. Seule la typographie utilisée au sein de la série, puisque le garçon sait décidément aussi très bien où chercher, n’est pas issue de sa création personnelle, celle-ci étant l’œuvre du grand architecte et designer écossais Charles Rennie Mackintosh (ça ne s’invente pas…), lui aussi natif de Glasgow, rattaché au mouvement Arts and Crafts et principal représentant de l’Art nouveau écossais au début du XXe siècle.

Sim City 5

Sim City 5

Google View et SimCity

Déjà exposé à plusieurs reprises dans sa ville natale glasgowienne, le jeune écossais, qui a peut-être quand même égaré quelques heures de jeunesse sur SimCity (et aussi sur Google View, car il fallait bien trouver des modèles à son travail…) est un passionné de musique classique (l’héritage de ses parents) et fut élève du prestigieux Royal Conservatoire of Scotland. Il est aussi, et tout s’explique ainsi, un passionné d’architecture, lui qui a passé une partie de son enfance à dessiner des façades d’immeubles et de paysages urbains, des esquisses annonciatrices qui ont fini par lui permettre de livrer, dès lors que l’on parle « pochettes d’albums », l’une des séries les plus abouties et les plus cohérentes de l’année.

Le son

Bénéficiant d’une solide formation en musique classique (le passage au Conservatoire a parfois du bon), C Duncan livre un album de pop bonifié par ces acquis antécédents, un premier album auquel il conviendra de joindre les termes de « folktronica » et de « dream pop » (d’autres pourraient convenir, car l’album est riche), et qui marque par une hésitation constante entre démarche intimiste et volonté d’amplification légère. Une chose est sûre : la pop de cet Écossais qui, on le rappelle, aura tout composé de bout en bout, virevolte aussi haut que les panoramas que suggèrent ces buildings édifiés dans les larges rues de Glasgow.

C Duncan (Site officielFacebook / Twitter / Instagram / SoundCloud)

C Duncan, Architect, 2015, Fat Cat Records, 48 min., pochette par C Duncan