Benjamin Fincher x Charles Siaux – Kamishibai


Benjamin Fincher : Charles Siaux - Kamishibai

La pochette qui honore le second album étrangement pop de Benjamin Fincher, le très complexe Kamishibai (le nom renvoie à une technique ancienne et illustrée de raconter le conte au Japon) est le fruit d’une collaboration à trois têtes et à trois esprits : le musicien, le vidéaste, le photographe.

Une figure, trois acteurs

D’abord, bien sûr, celle de Benjamin Fincher, à la fois sujet d’un album dont il l’est auteur-compositeur, du clip de l’excellent single « Go Outside », et de cette pochette d’album sur laquelle l’on reconnaît les traits de son visage malgré les couches de peinture épaisses.

Ensuite, celle de Clément Fessy, directeur exécutif de la boîte de production Music Audio Films, en charge de la réalisation du clip précédemment nommé, une vidéo dans laquelle il a pris le parti de matérialiser l’idée de kamishibai, en faisant du corps peinturé de Fincher un support à l’intérieur duquel il est possible de lire et de voir les sentiments perçus par son porteur.

Enfin, celle de Charles Siaux, en charge de la photographie sur le tournage, dont le cliché captant le portrait d’un Benjamin Fincher en buste, de trois-quarts, et recouvert d’une peinture jaune dégoulinante faisant passer le sujet pour un humanoïde inexpressif (on pense au i-Robot d’Alex Proyas), aura été retenue afin de devenir la pochette finale de l’album. On associera également le nom de Denis Carrier à l’élaboration de l’artwork de l’album. Beaucoup d’autres clichés seront pris sur le tournage. Cinq autres seront notamment conservés et formeront, avec la photographie première, les six parties du livret de l’album qui représentera à terme le personnage jauni en entier jusqu’au sous nombril.

Et le choix du jaune, dans tout ça ? Charles Siaux s’explique : « Cette préoccupation-là est avant tout esthétique, pas tellement cérébrale. On a fait le choix du jaune pour la pochette par simple volonté de ne pas tomber dans des choix trop évidents. Mais les documents presses contiennent aussi des visuels avec d’autres couleurs, comme le vert, que l’on avait envie d’utiliser également ».

Recto, verso, paradoxe

Cette pochette, la première officiellement signée par le photographe lyonnais Charles Siaux, véritable passionné du genre (« J’ai regardé des pochettes de disques avant de regarder des livres d’art »), sera accompagnée au verso de l’album par une figure semblable, mais sans peinture. On se retrouve ainsi confronté aux deux versants sensés d’une même figure. D’un côté (au recto), on se retrouve avec un être humain dénudé, symbole d’une sensibilité exposée ici de la plus radicale des manières. De l’autre (au verso), on a un personnage camouflé sous une matière protectrice, isolé de ce fait par cette protection complexe et inhabituelle. C’est le rapport paradoxal et complexe qu’entretient Benjamin Fincher avec sa musique qui est imagé ici.

Le son

Avec sa voix de Thom Yorke pudique et sa pop de laboratoires en plein air, le Niçois Fincher livre un album discrètement ambitieux. Mené par quelques pépites aux enluminures complexes quoique mélodiques (« Go Outside », « Long Distance »), Kamishibai fait honneur à la tradition de conte imagé que son nom implique : l’album est un voyage parsemé de vignettes que chacun explorera selon l’envie qui sera la sienne à l’instant décisif.

Benjamin Fincher (Site officiel / Facebook / Twitter)

Charles Siaux (Site officiel)

Dennis Carrier (Site officiel / TwitterTumblR)

Benjamin Fincher, Kamishibai, 2014, Pacinist, 43 min., pochette par Charles Siaux