Antibalas x Duke Amayo — Fu Chronicles


Depuis plus de vingt ans, le collectif new-yorkais Antibalas puise dans l’afrobeat (mélange de jazz, de highlife, de funk et de musique traditionnelle nigériane dont on attribue la création à la légende Fela Kuti dans les années 70) l’énergie d’une musique qui rencontre sur son passage punk rock, free jazz, latin-jazz, hip-hop, soul, afin d’aboutir à un métissage total. Porté comme un étendard sacré et inamovible, ces quelques mots, politiques et spirituels, qui disent autant l’ADN de l’afrobeat de Fela que celui d’Antibalas (un nom que l’on pourrait traduire par « à l’épreuve des balles ») : « Music is a Weapon » (« La musique est une arme »).

Fela et Kung-fu

Cet arme-là, elle est aujourd’hui mise au service de la rencontre de deux cultures. L’afrobeat donc d’un côté, et le Kung-fu de l’autre, l’art martial d’origine chinoise qui compose avec la dualité yin et yang pour transformer les pratiquants dans le plus profond de leur corps et leur esprit. Pour cet album anniversaire les leaders du groupe Martín Perna et le chanteur d’origine nigériane et professeur de kung-fu Duke Amayo ont décidé de revenir aux sources, dans le dojo Jow Ga Kung Fu du quartier new-yorkais Williamsburg. Et la pochette du disque, aussi, célèbre cette union :

Duke Amayo est musicien chez Antibalas depuis le début du projet il y a vingt ans — l’album Liberation Afrobeat Vol.1 est sorti en l’an 2000 —, mais aussi illustrateur de métier. Sur cet artwork, il dépeint Antibalas prenant le contrôle d’un immeuble de New York avant de le convertir en temple à la gloire du Soleil, une allégorie du disque qu’il nous décrit en détails :

C’est le symbole de l’avenir réclamant le droit indigène

Duke Amayo

« L’avenue des Amériques de New York se transforme en voie indigène avec sa mère dominant le centre-ville », nous écrit-il. « C’est le symbole de l’avenir réclamant le droit indigène. Une maison de solution, Antibalas, promeut la technologie de demain par le biais du Temple du Soleil, où sont enseignées les voies du kung-fu, la danse indigène, les arts et la tradition, la physique quantique, les énergies universelles, la musique, etc. » La liberté par le savoir, la maîtrise de soi, le respect de l’autre. Et par cette incarnation visuelle du kung-fu qui, et à l’image de la musique et du message promut par Antibalas, est autant une manière de se défendre qu’une manière d’exister.

Le son

Vingt ans après la sortie de Liberation Afrobeat Vol.1, première pierre d’un édifice artistique qui se réclamait de l’afrobeat afin de chanter les espoirs d’un monde moins inégalitaire et plus juste, Antibalas revient aux sources, et trouve dans le dojo Jow Ga Kung Fu du quartier new-yorkais Williamsburg une nouvelle inspiration. Mené par les dix-sept musiciens du collectif, Fu Chronicles imprègne son afrobeat mondialisé dans des effluves de Chine — le pays originel du kung-fu — et teinte le tout, et avec la même hargne groovée qu’à ses débuts, d’un militantisme toujours aussi ardent. « Music is a Weapon », disent-ils toujours.

Antibalas (Site officiel / Facebook / Twitter / Instagram / YouTube)

Duke Amayo (Facebook / Twitter)

Antibalas, Fu Chronicles, 2020, Daptone Records, 49 min., artwork par Duke Amayo